Ni une semaine de pluie tombant à verse, ni un pont emporté par la crue juste devant nous, ni les méphites de boue qui pullulaient n’eurent raison de la bonne humeur de Friedin Gai-peton. Chaque soir, nous établissions notre campement et tentions vainement de faire sécher nos vêtements humides dans les tentes dressées sur un sol gorgé d’eau, maudissant ce voyage et tout ce qui s’y rapportait. Jurant en toutes les langues, nous nous arrêtions à chaque fois quelques instants, stupéfaits par sa persévérance. Le voilà qui bâtissait méticuleusement un petit appentis au-dessus d’un tas de bois humide, ramassé avec obstination au cours de notre marche. Il voulait un vrai foyer au centre du camp : le fait qu’il y eût plus de fumée que de feu ne le dissuadait pas. Toussant et pleurant, il poursuivait ses efforts jusqu’à ce que les flammes dansassent gaiement sous la marmite dans laquelle il faisait cuire une soupe « à la fortune du pot » – une de ses expressions favorites. Manger chaud était alors notre seul réconfort et nous lui étions infiniment reconnaissants de cette forme de folie qui l’animait. Il apaisa ainsi de nombreuses tensions et disputes, simplement en étant là, au bon moment, avec une solution concrète et pragmatique. À sa manière discrète, notre compagnon halfelin était un héros : il avait sauvé le groupe et la mission.
Le soleil revint quand nous arrivâmes à destination. Nous exultions, mais lui restait d’humeur égale, toujours souriant et ouvert au monde.
Extrait des mémoires de Mirë Lelyen, explorateur elfe
Nous nous orientons vers deux sous-races de halfelins : les pieds-légers et les pieds-sûrs.
Les premiers sont analogues aux hobbits du Seigneur des anneaux ou au peuple de Willow dans le film du même nom -- ça date de 1988 ^^ et ont été illustrés par Charlène et ci-dessous par Gawain. Vous les rencontrerez facilement dans les campagnes des environs de la Cité franche ainsi que dans certains quartiers de grandes villes où ils sont entassés, parfois dans des conditions insalubres. La réputation des pieds-légers de la campagne est d'être de sympathiques paysans (ou d'origine paysanne) et dans les villes, d'être voleurs... Autant dire qu'il faut un moral d'acier pour affronter le monde quand on est petit et qu'on bénéficie de ce genre d'a priori.
Les pieds-sûrs en revanche sont moins connus et spécifiques à Eana. Ils sont inspirés des Pygmées et de la découverte de "l'homme de Florès", ainsi que d'un des personnages figurant dans le Signe des Quatre par Sir Arthur Conan Doyle. Son terrain est ainsi plutôt tropical et forestier. Il fait un excellent guide dans ces régions, mais les tribus ont des mœurs pour le moins contrastées : vous pouvez aussi bien tomber sur de petits rôdeurs talentueux et bienveillants que sur des chasseurs de tête cannibales ! Le moyen de les distinguer ? Pour un initié, aucune difficulté : les airs de tam-tam, les chants, les parures corporelles, les accessoires... tout est différent d'une communauté à l'autre. Évidemment, pour l'aventurier naufragé sur une île tropicale, il est moins évident de s'y retrouver et de comprendre que "pieds-sûr" n'est pas équivalent à "pieds-sûr".
Le halfelin Friedin Gai-petons par Gawain